Jadis, si l'on m'avait questionné à brûle-pourpoint au sujet de MASTODON, j'aurais confessé, sans vergogne et avec renfrognements : "MASTODON ? J'aime pas". Mais aujourd'hui, il y a "Crack The Skye", et rien ne sera jamais plus comme avant...

Fruit d'une mutation importante, ce rejeton entérine la disparition du chant hurlé et des riffs hystériques, sonne le glas de la facette Metalcore des albums précédents (leur coté un peu MESHUGGAH…). Il se différencie aussi par une production un peu plus sourde, ne laissant que peu d’espace entre les instruments, mais impeccablement clean et totalement adaptée à leur nouvel univers - à titre d'indication, le morceau le plus proche de "Crack The Skye" me semble être "Sleeping Giant" (qui figure sur "Blood Mountain").

Quoiqu'il en soit, en ce qui me concerne, ce dernier opus exerce un pouvoir d'envoûtement extrême. Il déverse des atmosphères qui me fascinent littéralement - à la façon TOOL dirais-je, si j'osais. Outre un ralentissement notable, mais sans pour autant en être mou du jnou, au contraire, "Crack The Skye" se teinte aussi d'un psychédélisme 70's évident. Ce Metal pas banal fluctue entre Hard Rock mastoc, et Thrash/Death sophistiqué, à la croisée d'un BLACK SABBATH sulfureux (ou plutôt de son héritier vintage CATHEDRAL) et des riffs et arpèges sinueux, chauffés à blanc, d'OPETH ou ENSLAVED. De plus, cet album est parfaitement structuré : trois titres épiques ("Oblivion", "The Czar" et "The Last Baron", mes préférés !), et séparant chacun d'eux, deux bombes, vives et dévastatrices.

Et enfin, afin de vous mettre dans l'ambiance, trois mots à propos du premier morceau, "Oblivion". Il débute sur un thème de quelques notes, à la consonance inquiétante, étayé sur-le-champ par des roulements de toms... le thème évolue, la tension monte, monte, monte encore... Déboule ensuite un riff de maboul, nerveux, mais contrebalancé par un tempo plus lent à la batterie, décalé. Le chant se greffe, lancinant et assez monocorde, renforçant derechef une impression déjà bizarre... Un pont permet alors aux vocaux et à la rythmique de s'harmoniser, de se synchroniser, amenant le refrain, qui éclate littéralement : bien fichu, riff et mélodie en accord parfait, un must. Bigarreau sur le morceau : un solo de gratte surnaturel ! A la fois précis et spatial, hypnotique et avec feeling. Deux mesures, une un peu glauque, presque ténébreuse, l'autre, grâce un changement de tonalité singulièrement magique, à l'opposé, scintillante et limpide.

Voilà, je pense que MASTODON a réalisé là un album peu commun, inspiré et fascinant à plus d'un titre. Quant aux possibilités que cela laisse entrevoir, no limits, tout est permis... ! (4,5/5)