Des quatre albums solo de KISS sortis simultanément en 1978, un seul aura durablement marqué les esprits : celui d'Ace FREHLEY. Et ça n'est pas sans raisons parce que c'est de très loin le meilleur.

Alors que Peter et Gene se sont contenté de faire de la soupe et que Paul a tenté bon gré mal gré de pondre un album plus rock'n'roll mais techniquement pas à la hauteur, Ace a accouché d'un véritable chef-d’œuvre. Tous les titres ont été écrits et composés par le Spaceman à l'exception du hit commercial "New York Groove", qui est l’œuvre de son pote Russ Ballard. Le chant ainsi que l'intégralité des guitares, basse comprise, sont l’œuvre d'Ace lui-même. Frustré de ne pas être reconnu à sa juste valeur au sein de KISS, l'homme au maquillage argenté a ici trouvé le moyen de laisser se déchaîner son immense potentiel artistique.

C'est la raison pour laquelle son album est aussi bon, riche qu'il est de toutes les bonnes idées qu'Ace a dû laisser au placard des années durant. Plus proche de la ligne artistique de KISS, le skeud peut néanmoins se prévaloir d'un niveau technique général dépassant celui des premiers albums du groupe du bisou. Conçu par un fan absolu de Jimmy Page, ce premier FREHLEY fleure bon le LED ZEPPELIN, avec des riffs aux petits oignons ("Rip It Out"), ou des délires complètement psychédéliques ("Ozone").

Après seulement deux interventions au micro de KISS sur les titres "Shock Me" et "Rocket Ride", Ace fait preuve d'une étonnante aisance au niveau du chant. Bien que ses capacités vocales réduites ne lui permettent pas une grande variété de registres, on sent qu'il y a mis du cœur. Sa voix très particulière colle admirablement bien à son personnage intrigant et lunatique, et se mêle idéalement à la panoplie d'expérimentations qui s'échappent de ses guitares.

Ajoutez à cela une performance grandiose de l'excellent Anton Fig à la batterie, ainsi que quelques discrètes mais judicieuses intervention d'un chœur de gospel, et vous obtenez un très grand album de Hard Rock, une des pièces maîtresses des années 1970. Après ce coup de force qu'il a vécu comme un nouveau départ, Ace verra sa place croître considérablement au sein de KISS, multipliant les interventions sur les albums "Dynasty", "Unmasked" et "The Elder", qui sont malheureusement les plus mauvais de l'histoire du groupe... Avant que l'alcool ne le précipite au fond du gouffre pendant de longues années. Ace FREHLEY est assurément un très grand artiste vis-à-vis duquel la vie a été plus qu'injuste. Ce premier album solo constitue le meilleur témoignage de son immense potentiel.