Si c'est "Sad Wings Of Destiny" qui permet au groupe d'obtenir un peu de popularité, il est évident que de passer du système quasi artisanal de son manager de Gull Records à la machine CBS a fait faire un immense bond en avant aux Anglais. Bien décidés à parfaire encore leur Heavy Metal, et rôdés par une tournée américaine achevée en apothéose par une première partie de LED ZEPPELIN à Auckland (deux dates auraient dû avoir lieu en compagnie du géant Dirigeable, mais Robert Plant doit rentrer en catastrophe pour les Midlands, son fils vient de mourir subitement).

Maintenant accompagné d'un batteur à la hauteur de ses ambitions, JUDAS PRIEST ne débande pas et rentre en studio pour écrire et mettre en boîte le successeur de "Sin After Sin". Très vite, il apparaît que le groupe peut désormais s'exprimer totalement après sa mue Heavy Metal. Le groupe a trouvé son style, et les sessions hyper productives donneront même l'occasion à Les Binks de participer au processus d'écriture, alors que le trio Tipton/Halford/Downing s'impose durablement.

Augmenté d'une reprise de SPOOKY TOOTH ("Better By You, Better Than Me" qui leur vaudra l'ire du PMRC) ajoutée en dernière minute sur demande de la maison de disques qui veut à tout prix faire percer le PRIEST aux USA, et produite par James Guthrie (ce qui explique la différence de traitement sonore, notamment au niveau de la batterie), qui lui vaudra de devenir le partenaire privilégié pour "Killing Machine", "Stained Class" est le premier album de JUDAS PRIEST qui ne souffre d'aucun temps faible. Chaque titre impose les vocaux impériaux et si particuliers de Rob Halford, les riffs tranchants, bien que limités par le son qu'il était possible d'obtenir fin 1977 début 1978.

Les compositions sont intelligentes, diversifiées, acérées et si toutes ne sont pas des tubes immédiats, elles canalisent parfaitement les capacités du groupe à ce moment de sa carrière. De l'ouverture speed "Exciter" au délirant "Saints In Hell" dans un esprit à la "Sinner" de l'album précédent, en passant par la sublime power-ballade "Beyond The Realms Of Death", "Savage, "White Heat, Red Hot" il n'y a vraiment rien à jeter.

Pourtant il semble bien que le groupe ne parvienne à atteindre sa plénitude sonore que sur "British Steel" deux ans plus tard. Entre le PRIEST de la fin des années 70 et celui triomphant des années 80, mon cœur a toujours balancé, car les plus gros tubes interviennent à l'époque de la NWOBHM. Et pourtant j'admire cette écriture novatrice carrément en avance sur son temps, qui fait passer BLACK SABBATH pour un groupe dépassé durant la période entre "Sad Wings Of Destiny" et "Killing Machine" qui préfigure carrément le renouveau du mouvement. L'avenir du Heavy Metal c'est JUDAS PRIEST qui l'écrit en 1978.