La démo devenue premier album du groupe montrait deux choses : une marge de progression évidente au vu de la disparité des titres et une originalité ressortant sur les morceaux les plus Heavy comme "Beauty & The Beast" ou "Elvenpath" alliée à une capacité à écrire de bonnes mélodies ("The Carpenter" que j'ai toujours beaucoup aimé).

Le groupe s'est entretemps doté d'un bassiste en la personne de Sami Vänskä, avec qui Tuomas avait déjà joué en amateur. Il restera avec la formation jusqu'à son hiatus après la tournée de "Wishmaster" quand les différends quant à l'évolution artistique de NIGHTWISH mettront le futur du groupe en danger (selon Tuomas). NATTVINDENS GRÅT fournira d'ailleurs un autre artiste talentueux à la scène finlandaise : Wilska Tapio, qui deviendrait le vocaliste de FINNTROLL sur le fantastique "Nattfödd". Il est ici la voix profonde du pharaon sur le monstrueux "Pharaoh Sails To Orion" que la jeune Tarja aura toutes les peines du monde à enregistrer à l'époque. Ajoutons à cela que Jukka rejoindra même le projet de Wilska – SETHIAN - et que l'imposant musicien sera technicien de tournée pour NIGHTWISH pendant les années qui suivent, lui qui a aidé le groupe à signer chez Spinefarm Records.

La scène finlandaise de l'époque se serre les coudes. NIGHTWISH fédère c'est indéniable et ce deuxième album va propulser le groupe au sommet des charts finlandais (68 000 copies tout de même). Lorsqu'il débarque sur le reste de l'Europe au printemps 99 c'est un raz-de-marée. Album-référence qui traduit avec panache les ambitions de NIGHTWISH, "Oceanborn" renferme quelques-unes des plus belles pépites du groupe. Il troque les penchants Folk doucereux de "Angels Fall First" pour lorgner, comme beaucoup de formations finlandaises, sur le chef de file de la scène – STRATOVARIUS – qui va décomplexer pas mal de jeunes musiciens et créer de nombreuses vocations (SONATA ARCTICA va sortir son premier single en juillet 1999).

On sent sur ce deuxième album un groupe jeune mais débordant d'énergie ("Stargazers"), désireux de montrer ses capacités techniques ("Gethsemane", "Devil & The Deep Dark Ocean"). Mais en dehors de Tuomas Holopainen, le compositeur et claviériste, c'est incontestablement Tarja Turunen qui tire son épingle du jeu. Si elle n'a pas encore le niveau stratosphérique qu'elle atteindra quelques années plus tard, sa performance sur "Oceanborn" est époustouflante ; elle racontera avoir pleuré lors des sessions, ne parvenant pas à enregistrer les lignes de chant difficiles concoctées par Tuomas : et à l'écoute d'un "Stargazers" ou d'un "Pharaoh Sails To Orion" on comprend pourquoi ! Certes le chant lyrique peut en rebuter certains, mais Tarja Turunen possède quelque chose d'unique indubitablement.

Vu la déferlante engendrée par ce disque et son successeur encore plus abouti "Wishmaster", ce disque est devenu culte et il y a de quoi. Néanmoins il ne faut pas en déduire trop rapidement qu'il mérite son statut de chef d'œuvre. NIGHTWISH frappe très fort avec des titres inoubliables comme "Stargazers", "Sacrament Of Wilderness", "Passion And The Opera", "Pharaoh Sails To Orion" ou encore la doucereuse "Sleeping Sun" au charme magnétique qui repose, tout comme la touchante "Swanheart" pour le talent d'interprète de Tarja. Le reste trahit encore la jeunesse du combo, avec un instrumental salvateur en cours de route avec "Moondance", mais les plus bigarrés "Gethsemane" et "Devil & The Deep Dark Ocean" s'éparpillent, et "The Riddler" est bien moins mémorable. J'exclue volontairement "Walking In The Air" même si elle me plaît beaucoup, et que la capacité de NIGHTWISH à se réapproprier ce thème d'Howard BLAKE est épatante.

NIGHTWISH n'en est qu'à son deuxième album mais il affiche déjà des capacités hors du commun, celles qui font les grands groupes, et "Oceanborn" est incontestablement un incontournable de ce qu'on appellera le Metal à chanteuse / Symphonique, même si le groupe ne méritera véritablement cette appellation symphonique qu'à partir de "Century Child", et ce malgré ses imperfections.