C'est marrant comment CHATEAUX semble jouir d'une grande sympathie chez ses contemporains, je me souviens encore comment j'ai découvert ce groupe dans les années 2000 (étant bien trop jeune pour les avoir découvert dans les 80s, et le groupe n'était pas spécialement cité dans les mags des 90s), c'était via des commentaires hyper enthousiastes émanant de Hardos ayant bien connu cette époque. Aujourd'hui, en 2020, même constat : à chaque fois que quelqu'un poste un message sur un réseau social idoine au sujet de CHATEAUX, il génère toujours le même enthousiasme chez les "anciens" (un jour, on sera tous des "anciens"). J'avais donc pu acquérir l'intégrale en une fois (grâce à l'anthologie "Fight To The Last!"), je l'ai écoutée de nombreuses fois, et si tout cela m'était tout à fait sympathique, j'avoue n'avoir jamais compris que ça puisse générer un tel enthousiasme, et les années passées ne font rien pour changer ce constat.

CHATEAUX est donc un de ces groupes tardifs de la NWOBHM, de ceux qui n'ont publié leur premier album qu'en 1983. Pas simple de se faire une place dans le monde du Heavy anglais quand on arrive un peu après tout le monde. Ce "Chained And Desperate" avait en tout cas le mérite de présenter un artwork très bien fichu pour l'époque et collant plutôt bien avec le patronyme amusant du groupe, ce qui ne sera pas toujours le cas par la suite. Particularité de cet album : le groupe s'offre au chant les services de Steve Grimmett, mais dès le départ ce dernier n'était pas censé devenir un membre à part entière, il n'est là qu'en tant que guest et ne figure donc que sur cet album. Steve Grimmett se fera ensuite un nom avec GRIM REAPER et on comprend pourquoi car ce gars était doté de capacités vocales plutôt impressionnantes... Mais malheureusement mal mises en valeur par la prod épouvantable de ce premier essai longue durée ! Une habitude chez les groupes de l'écurie Ebony Records (dans le même genre on pourra citer SAVAGE ou NIGHTMARE).

Ce premier album ne propose rien d'original : c'est du Heavy parfaitement dans le moule de ce qui sortait des aciéries anglaises. Il n'y a pas vraiment de personnalité là-dedans, ça riffe plutôt bien et ça fait le job, mais au final c'est surtout certaines lignes de chant de Steve Grimmett que l'on va le plus retenir. Car au niveau des instrumentistes il n'y a pas grand chose à signaler, ça joue comme ça doit jouer, avec cela dit une certaine énergie, des soli peu mémorables mais franchement bien Rock'N'Roll voire un chouïa bruitistes. On prendra en tout cas un pied certain à l'écoute du très martial "Chained And Desperate" qui ouvre les hostilités, et auquel succède le plus ambitieux "Spirit Of The Chateaux" qui tente de créer une certaine atmosphère (de donjons ?), et c'est plutôt réussi, surtout grâce au lyrisme apporté par Steve Grimmett pour narrer ce récit bien mystérieux (mais quel est donc ce "Chateaux Racard" ?). Mais c'est aussi un problème car "Spirit Of The Chateaux" est sans doute le meilleur titre du groupe et vous aurez donc compris que la suite n'est jamais du même niveau. La power ballade "The Dawn Surrendered" est bien trop longue pour ce qu'elle a à proposer, "Burn Out At Dawn" ou "Straight To The Heart" sont des défouloirs Heavy certes efficaces mais peu mémorables. "Baton Rouge" et le plus lourd "Son Of Seattle" retiendront un peu plus l'attention grâce à des refrains plus travaillés.

On a en fait ici un album typiquement ancré dans son époque, qui aura sans doute bien du mal à séduire les jeunes générations surtout quand des jeunes groupes, dans le même genre, font souvent aussi bien mais avec un son bien meilleur. Quoiqu'il en soit, il ne s'agit pas en ce qui me concerne d'une perle méconnue de cette époque. D'ailleurs Steve Grimmett, qui tire nettement l'ensemble vers le haut, fera mieux la même année avec le premier GRIM REAPER. Mais "Spirit Of The Chateaux" peut prétendre au titre de petit classique de la NWOBHM, qui fera bonne figure sur des compilations ou des albums de reprises.

Quoiqu'il en soit, s'il ne faut écouter qu'un album de CHATEAUX, alors ça serait celui-ci. D'autant que les rééditions sont toutes accompagnées du premier single du groupe, "Young Blood" (dont l'on retiendra surtout la face B, "Fight To The Last"), chanté par le bassiste Alec Houston, et que je trouve ma foi très recommandable, et bien meilleur que pas mal de morceaux qu'ils enregistreront par la suite (seuls "Chained And Desperate" et "Spirit Of The Chateaux" sur ce premier album égalent pour moi les deux titres de ce single, qui est mieux produit d'ailleurs).