Imaginez deux secondes un multiverse où "So Far, So Good…So What!" et "Peace Sells… But Who’s Buying?" auraient interverti leur pochette… Le destin de ces deux galettes aurait-il pu changer, l’un porté aux nues, l’autre voué aux gémonies ? Non, parce que sérieusement, cet artwork dé-gueu-lasse de "SFSGSW" ne porte-t-il pas une petite responsabilité dans le relatif désamour subi ? Est-il si inférieur à son glorieux prédécesseur ? A l’écoute, c’est en effet loin d’être évident.

En une première valse morbide de line-up en appelant de nombreuses, le duo Young/Behler remplace donc l’attelage Poland/Samuelson sans que l’équilibre instable du gang ne soit véritablement rompu, l’ombrageux rouquin (je ne parle pas de Villageoise, calmez-vous) tenant déjà fermes les rênes de la machine MEGADETH. S’il n’atteint peut-être pas les sommets de son aîné (quoique, "In My Darkest Hour"...), je lui trouve personnellement plus de constance dans la qualité.

Un instrumental tout feu tout flamme pour ouvrir le bal, un sublime "Hook In Mouth" désabusé et iconique pour le clore, et que de bons titres entre les deux, à l’exception peut-être de la reprise de PISTOLS, fadasse et trop proche de l’originale, ou de "502", inutile. Ce sont bien là les seules fautes de goût de l’opus, qui enquille les morceaux marquants entre-temps : le premier titre composé après son renvoi de METALLICA "Set The World Afire", la superbe et enflammée "Mary Jane" ou le brûlot "Liar", écrit en "hommage" à Poland qui chourravait en douce des grattes pour payer son héroïne selon Davey, et dont les lignes de chant des couplets seront odieusement auto-pompés (© Marilyn MANSON) pour "Skin O’My Teeth" quatre ans plus tard.

MEGADETH continue à tracer sa route avec des titres de moins en moins alambiqués, mais toujours aussi inspirés, cette petite touche amère toujours aussi présente dans la voix de son frontman, qui se livre également de plus en plus dans les paroles, partageant ainsi de manière toujours plus impudique son acrimonie généralisée avec ses fans. Junior a pour la première fois voix au chapitre dans l’écriture, co-signant près de la moitié des chansons. Le signe d’un début d’ouverture pour Megadave ?

Mais comment ne pas conclure avec "In My Darkest Hour", monument mélodique composé d’une traite le jour où le frontman apprenait le décès de Cliff Burton par hasard, les Mets n’ayant pas cru bon de l’en informer eux-même. L’une des meilleurs pièce ever de MEGADETH qui aurait plus trouvé sa place sur "Countdown..." ou sur "Youthanasia" de par sa musicalité et sa sensibilité.

Vous l’aurez saisi, pour les émotions véhiculées, "SFSGSW" n’a pas à rougir de la comparaison avec le plus rutilant "Peace Sells…". À part peut-être visuellement, je dois l’admettre.
Mais imaginez…