Le COB de "Are You Dead Yet?" représente un truc assez fondateur dans ma vie de metalleux. C'est mon premier concert d'un "gros" groupe de Metal (genre pas local ni bio sourcé), déplacement dans la city de Lyon, tout lycéen que j'étais, j'y allais le poil fringant, la bite dure et les cheveux détachés. Je me rappelle m'être fait bolosser dès les premières minutes dans la fosse par des débiles déjà torse poil (ptain mais attendez au moins le dernier quart d'heure), avoir globalement rien entendu des lignes de clavier (une foule qui fait "lalala" régulièrement aidant quand même à mieux suivre), et avoir assez vite conclu que Laiho avait une attitude de trou de balle autant qu'un jeu de guitare vraiment solide. Une vraie rockstar de la salle d'envergure moyenne.
À la fin du concert, j'avais attendu la sortie des musiciens pour qu'ils me gratouillent mon ticket. Laiho avait accordé littéralement deux minutes à l'exercice avant de se barrer dans le tour-bus, imaginant sans doute une sorte de tapis rouge et les flashs des photographes, et laissant nous autres groupies la gueule pendante, et ce non sans avoir volé le stylo d'un type qui, scandalisé, essayait de se rapprocher du tour-bus en gueulant "enculé rends-moi mon stylo". Qu'a fait Alexi de ce stylo ? l'histoire ne le dit pas. Dans ces deux minutes, j'ai réussi à avoir une demi-signature du beau Finlandais, qui faisait glisser le stylo sans trop regarder, tel un Zorro aveugle. Entre moi et l'avant-bras du type de droite on aurait peut-être pu avoir le graffiti complet. Donc voilà, de "Are You Dead Yet?", je retiens ce ticket avec une sorte de gribouillis qui ne ressemble à rien. Depuis que le type est mort, je le regarde avec une forme de nostalgie blasée, embarrassé de ce que ça pourrait bien représenter.

Mais alors "Are You Dead Yet?", plutôt bon, plutôt nul, plutôt finalement très bon ? Mon avis sur le skeud a fait des montagnes russes, c'est un album bizarre, parce qu'il cédait une partie de l'identité du groupe à des sonorités américanisantes, mais le faisait sans trop se mouiller non plus. Comme s'il y avait une fondation très "Bodomesque" sur chaque titre et qu'ensuite il suffisait de gribouiller un peu de guitares Thrash, de mid-tempo lourds et des soli technico cracra pour plaire outre-Atlantique. La suite de la disco allait être tellement nulle que finalement, "Are You Dead Yet?" est à chérir.

Parce qu'il y a du bon riff sur tous les titres. À défaut de toujours pondre de belles chiasses verbales de gamins de douze ans énervé, Laiho peaufine son "chant hurlé" qui le rend de plus en plus unique en tant que vocaliste (le refrain de "Trashed, Lost & Strungout" reste en tête tout particulièrement), et en tire le meilleur parti.

Les guitares sont plus grasses, moins power, plus groove, plus core. Les tempos plus cassés, plus lents, l'atmosphère moins froide, plus "je sue des aisselles" que "je porte ma grosse parka de Finlandais, la mort m'appelle au level 7". Je ne vous apprends rien, je vous dis juste que finalement tout ça je m'y suis bien fait et que je réécoute cet album avec un plaisir non dissimulé. Je n'ai même pas honte de lui mettre 4/5, mais je vais sauver les meubles en disant que c'est un "petit" 4/5. Après tout j'ai une demi-signature de Laiho qui traîne quelque part.

Après soyons honnête, ce serait le pire album que l'on puisse conseiller pour commencer le groupe tant "Are You Dead Yet?" a le cul entre deux chaises. Pour le BODOM plus speed-nitendo-Thrash il y a "Something Wild", pour le BODOM plus motherfucking-ass-kicking-guitar-solo-dubidoodoobidoo il y a "Hate Crew Deathroll". Et pour la suite il y a sans doute un meilleur groupe que COB.