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KAMELOT - Ghost Opera (2007)
Par BAST le 30 Mai 2007          Consultée 19811 fois

Je souhaite attirer votre attention sur un point important : la note attribuée à un album se doit d’être le reflet de la chronique, et non le contraire. C’est écrit blanc sur noir sur le site, alors vous pensez bien. Pas évident, pourtant, de ne pas circonvenir à l’usage quand il s’agit d’évoquer le cas KAMELOT, son huitième bébé fraîchement calé sous le bras. Car deux shuriken de moins et le texte se charge rapidement de justifications. Alors j’y sursois et prends sur moi, au moins pour cette fois. Pourquoi ? Oui, pourquoi ?

La réponse tient à mon sens en deux explications.
Je place la première en premier, en espérant que cette logique implacable accompagne ma chronique jusqu’à son terme : si la cité arthurienne boit aujourd’hui la tasse, c’est qu’elle a voulu consacrer à une durée d’en moyenne quatre minutes un nombre de couches de clavier, guitare et orchestrations indémêlable. L’orfèvre de la haute couture baroque (spécialité : chemise en satin ébène sur pantalon de velours carmin) nous a apprêté un ensemble bien coupé, mais les rombières qui l’investissent lui font perdre ses formes. Et irrémédiablement, les coutures craquent sous les bourrelets.

Des bourrelets, des bourrelets... Entretenus par Sascha Paeth, quand même. On a vu pire. Le producteur allemand s’érige plus que jamais en ennemi de la liposuccion. Lui qui avait déjà l’habitude de nous confectionner des mille-feuilles luxuriants s’est frotté à la pièce montée pour mariage princier. Et le résultat constitue l’un des ses ouvrages les plus aboutis. Ouf, voila au moins retrouvée une valeur sûre propre à KAMELOT, même si les choux du dessus restent en travers de la gorge.

Seconde explication, essentielle bien sûr, les compos ne fournissent pas leur comptant d’idées habituelles. Pas forcément plates, les mélodies n’ont pas toujours ce génie que KAMELOT savait si bien capter. Inventivité et surprises boudent l’œuvre, plus convenue qu’à l’ordinaire.
En outre, à défaut d’un agencement anticonformiste, les morceaux se dressent les uns à côté des autres dans un élancement haussmannien : couplet, refrain, solo, tout ce beau monde au garde-à-vous.

Après l’œuvre ambitieuse flanquant en deux côtés le quête initiatique imaginée par Goethe, KAMELOT fait cette fois-ci faux bond au concept-album, même si le titre de l'album vient d'une chanson traitant d'un autre texte sacralisé, le « fantôme de l’opéra », imaginé par Gaston Leroux. La prochaine fois, on aura peut-être droit au « Mystère De La Chambre Jaune » puis, sait-on jamais, aux « Bijoux De La Castafiore » (et si la pie avait eu un complice, mmmmh ?), l’inspiration d’ordre mystico-troublante ne manque pas.
Et sur une légende orchestrée autour de l’opéra Garnier, KAMELOT nous sert des compos ultra-douces.

Le speed reste présent mais relégué au second plan. Place aux compos léchées où la part belle est faite à l’orchestre et à l’inestimable voix de Khan. Re-ouf ! Une autre valeur sûre de confirmée. L'américain est incroyablement doué et ne se prive pas de l’afficher.

Si le heavy est symphonique, c’est quand même qu’à la base... il est heavy. Loin derrière, la guitare rythmique a réussi à s’inviter. Le terme est adéquat. On se demande parfois par quels moyens elle s’est ainsi dénichée un coin depuis lequel s’exprimer. Sascha Paeth est merveilleux, vous dis-je... Par contre, les soli bénéficient d’un mixage nettement plus honorable. Forcément, leur touche néo-classique se marrie bien mieux avec les nappes symphoniques.
Côté clavier, le nouvel arrivant Oliver Palotai fait une entrée discrète. Car de démonstration d’agilité, il n’en est que rarement question. Sa prestation se borne à l’emploi de samples orchestraux.

Après un début prometteur (« Solitaire » et son violon tout en caresses, le dynamisant « Rule The World » qui allie des plans de guitare directs à une orchestration travaillée, la superproduction « Ghost Opera » et son refrain éclatant), le camelot d’habitude irréprochable nous refourgue de la seconde fraîcheur.
Le sait-il seulement ?
Que dire en effet de « The Human Stain » qui copie sur son voisin « Rule The World » ? Et « Blücher », en sa position convoitée de cinquième titre n’aurait-il pas mérité un autre traitement, par respect pour le fantôme obsédé par la loge de même cardinalité ? Le refrain qui se dévoile dans son plus simple appareil n’est pas davantage rattrapé par les couplets monotones que par l’intro, aussi symphonique soit-elle, classique au possible.
La fausse ballade « Love You To Death » trompe l’ennui de justesse grâce à un refrain ingénieux, de même que « Up Through The Ashes » qui ne s’élève pourtant pas assez, en dépit d’une intro martiale bien trouvée et d’une ambiance chaotique convaincante.
Fort heureusement, les promesses faites 20 minutes plus tôt vont finir par être tenues. Le magnifique « Mourning star » et son chant à deux voix détient son lot d’éclats d’or, ceux charriés par le chant de Khan ont toutefois été tamisés (malheureusement) par des effets électroniques, « Silence Of The Darkness » propose une approche brute et heavy rafraichissante pour un titre orienté speed mélodique et la ballade « Anthem » brise l’anathème, tentant de libérer notre enthousiasme grâce à de fort jolis passages, même si ce titre manque un peu de variété.

Les albums de prog ont la réputation d’être difficile d’accès, la faute à des titres aussi alambiqués qu’un enchevêtrement de spaghettis. « Ghost Opera » produit le même effet, mais c’est la profondeur du son qui impose de nombreuses écoutes, attentives, hardies, avant que sa trame ne se dévoile enfin. Un aspect dont KAMELOT avait déjà fait son ordinaire, certes, mais sur « Ghost Opera », on frise l’insolence.
La lassitude en gagnera certains avant l’émergence finale de l’œuvre. Si les compos devaient se montrer à l’image des coursives labyrinthiques des sous-sols de l’opéra Garnier, le fantôme se serait vite perdu, obligé de mettre fin à son calvaire en se noyant dans son lac. Car l’acuité auditive devient une condition essentielle si l’on veut bien distinguer ce titre-ci de ce titre-là tant les arrangements écrasants ont cette fâcheuse tendance à diluer les compos les unes dans les autres.

Pourtant, KAMELOT ne passe pas complètement au travers. Moins percutant que ses deux prédécesseurs, moins varié aussi, la faute à une envie irrépressible de bourrer jusqu’a la gueule des compos dont la structure ne le permet pas forcément et à des passages trop faciles, « Ghost Opera » confirme certains des points forts de son géniteur : le chant, je me répète, certains refrains (« Rule The World », « Ghost Opera », « Silence Of The Darkness ») ou encore des soli mémorables (« Mourning Star »).
Ensuite, quoi que l’on ait à dire et redire sur la place des orchestrations, elles ont aussi le mérite de proposer des ambiances convaincantes, parmi les plus sombres traitées par le groupe, et de nombreux passages splendides (« Rule The World », « Mourning Star »). Enfin, le travail sur la batterie, variée autant que riche, est à souligner. C’est d’ailleurs la première fois que je le remarque à ce point sur un album de KAMELOT.
Autant d’arguments propres à faire oublier l’aspect pécuniaire. En tout cas pour certains.

La recette 2007 du bigmac saumoné sera donc indigeste car trop riche en sauce, pas assez en matière première. C’est avec « Ghost Opera » que KAMELOT communique cette impression désagréable de vivoter sur ses acquis : le chant magnifique de Roy Khan, la production irrésistible de Sascha Paeth en première ligne mais aussi un agencement parfaitement rodé.
« Ghost Opera » ou la volonté de la fusion ultime entre le metal et le symphonique.
« Ghost Opera » ou le gâteau écrasé par la cerise.

La version limitée de l’album proposera plusieurs vidéos dont le making-of de « Ghost Opera » et le clip sympathique accompagnant le titre du même nom, titre qu’on avait d’ailleurs pu découvrir sous la forme d’un single dispensé uniquement lors de la dernière tournée de KAMELOT. En outre, on aura droit à un livret plus fourni, la possibilité peut-être de constater encore mieux le talent de la française Alexandra v Bach, également connue sous le pseudo Ravendusk, à qui l’on doit les illustrations.

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Par DARK BOUFFON




 
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   (2 chroniques)



- Roy Khan (chant)
- Thomas Youngblood (guitare)
- Glenn Barry (basse)
- Casey Grillo (batterie)
- Oliver Palotai (claviers)


1. Solitaire
2. Rule The World
3. Ghost Opera
4. The Human Stain
5. Blücher
6. Love You To Death
7. Up Through The Ashes
8. Mourning Star
9. Silence Of The Darkness
10. Anthem
11. Edenecho



             



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