Drôle de moment que celui où sort ce cinquième album de la curiosité finlandaise qui n'en finit plus de voir son influence grandir. Mon meilleur ami Nico a déjà quelques disques de NIGHTWISH et je suis en boucle sur "Wishmaster" depuis des mois, ma découverte du Metal est chaque jour plus passionnante et "Nemo" commence à être assez largement diffusé (y compris sur Le Mouv') et je sens que le côté purement Heavy semble s'estomper. Mais ce qui me frappe le plus c'est le chant de Tarja, de plus en plus naturel, moins lyrique, et plus medium également.

Et puis c'est aussi une sale période pour la scène finlandaise, entre les vraies fausses rumeurs en tout genre qui alimentent le quotidien d'un STRATOVARIUS en totale perdition, et les paroles débilement affirmées par Kimberly Goss (avec qui NIGHTWISH avait tourné) annonçant que le groupe allait se séparer. Autant dire qu'en dépit d'un succès populaire incontestable, l'équilibre et la belle unité de la scène semble s'effriter (CHILDREN OF BODOM commence à faiblir également). NIGHTWISH a bien quelques difficultés à gérer un nouveau virage artistique qui naît de l'inspiration en mouvement de Tuomas Holopainen dirigeant le groupe vers des rivages nettement plus symphoniques, voyant sous l'expertise de Pip Williams ses visions cinématographiques prendre corps, mais il arrive à un niveau de popularité qu'il n'avait encore jamais connu.

"Once" montre un NIGHTWISH métamorphosé, qui bénéficie largement de l'influence sonore d'un RAMMSTEIN devenu la référence du gros son qui tâche. Le jeu typiquement Heavy Metal se dissout quelque peu au profit de rythmiques pachydermiques et de riffs de mammouth ("Dark Chest Of Wonders", "Planet Hell"), pour faire la place aux orchestrations qui prennent également le pas sur les claviers, même si ces derniers ne sont pas absents pour autant : "Planet Hell" encore, "Ghost Love Score" ou encore "Nemo" affichent un bel équilibre.

Il faut se faire à un discours plus varié qui peut déstabiliser les fans de Power Symphonique qui chérissent telles des tables de la Loi "Oceanborn" et "Wishmaster" tant on s'en éloigne de façon assez franche. Mais il reste une intelligence de composition réelle, un sens de la progression qui donne une profondeur inouïe à certains titres ("Ghost Love Score") et qui trouve son apogée sur "Creek Mary's Blood" avec ce break après le solo de guitare amenant sur une déferlante de double grosse caisse sous les vocalises si particulières et profondes de John Two-Hawks (et ce sera encore plus impressionnant sur le DVD live ponctuant la tournée) avant de retomber sur un intimiste clavier/voix tout juste soutenu par la flûte.

Et il y a le rôle déterminant de Marco Hietala, qui après s'être déjà fait remarquer sur "Century Child" chante sur une grosse partie des titres en duo avec Tarja Turunen et pour une réussite totale. Le single dansant "Wish I Had An Angel" en est un bel exemple, mais le sommet est selon moi atteint quand Tarja fait la sirène en arrière-plan pendant que le chanteur-bassiste de TAROT tient les premiers rôles, on est au niveau de son éclatante prestation sur "Dead To The World". Marco est plus qu'un atout pour NIGHTWISH, il en devient sur "Once" une pièce-maîtresse.

NIGHTWISH a muté c'est clair et ne réussit pas le sans-faute (les plus moyens "Dead Gardens" (qu'on serait bien content d'avoir sur un des derniers albums et qui avec le recul aurait parfaitement convenu à Anette Olzon) et "Romanticide" qui peinent à soutenir la comparaison avec l'excellence du reste) mais "Once" est un recueil de compositions personnelles, très individualisées, et abouties jusque dans le moindre détail (ici un renversement d'accord à la basse, là une partie de sitar - merci Sami Yli-Sirniö de WALTARI). Le quintette finlandais a réussi à homogénéiser son discours et son image, qui ne reposent plus sur les seules épaules d'une Tarja Turunen dont les envies d'ailleurs se manifestent déjà en privé.