Vingt ans ! Depuis la découverte du titre "Son Of Sorvahr" (*) à sa sortie, c'est à peu de choses près le temps qu'il m'aura fallu pour me pencher sur cet Opera Metal Heavy/Power qui a su marquer les 2000. Je savais, qu'un jour j'y viendrais ! Mais un achat en chassant un autre - et l'évolution des goûts musicaux étant ce qu'elle est -, davantage de temps que prévu fut nécessaire pour y parvenir. Mais en cet aride été 2022, c'est chose faite !

Dans son style propre, à balancer ainsi sa palanquée d'invités officiant au sein de la scène Metal ou affiliée, AYREON a fait des émules depuis le succès de son "Into The Electric Castle" (1998), à commencer par AVANTASIA puis, donc, cet AINA, sorti de quasiment nulle part. "Quasiment", car à la composition, les sieurs Sascha Paeth et Robert Hunecke-Rizzo (tous deux ex-HEAVENS GATE) ont tout de même de la bouteille, entraînant avec eux et à divers niveaux d'implication les fidèles de - ce que j'appelle - la Paeth-team (comprendre, les inébranlables Amanda Somerville (histoire, textes, chant), Michael 'Miro' Rodenberg (claviers, orchestrations), Tobias Sammet (EDGUY, AVANTASIA, chanteur guest), André Matos (ANGRA, SHAMAN, chanteur guest), etc.).

Pour servir le présent concept (et puisque c'est avant tout ce qui nous intéresse pour ce type d'œuvre), à savoir deux frères ennemis, évidemment princes, et non moins évidemment tombés amoureux de la même meuf (classique parmi les classiques), AINA nous propose un casting essentiellement orienté Spimélo/Power, qui saura présenter quelques généreuses surprises. Et j'aimerais commencer par l'excellente prestation de Thomas Rettke (ancien HEAVENS GATE, comme de par hasard) campant LE Grand-Méchant de l'histoire (le véritable héros de l'album, c'est lui) et parfait dans son registre Heavy agressif. Notons aussi parmi les bons points, celles de Tobias Sammet qui-fait-du-tobiasamette mais avant qu'il ne se transforme en cet horripilant sac-à-gimmicks, et de Candice Night de BLACKMORE'S NIGHT dont la voix si pure incarne fort élégamment la grâce divine de son personnage. A contrario, le casting saura aussi souffrir de quelques hoquets, comme pour Glenn Hughes (DEEP PURPLE, principalement) plus d'une fois à côté de ses chausses et à la rare exception d'un "Rebellion" où il affiche un peu de hargne, il s'en trouve particulièrement exaspérant à minauder comme un elfe en pamoison devant une salade trois-fougères.

Qui citer d'autre ? Michael Kiske ? Dommage de lui coller un rôle de narrateur quand on connaît ses capacités et dont il ne fera montre que sur la ballade "Silver Maiden" (accordons-lui cela). Ceci-dit, Kiske et le Metal en 2003, hein, son intégration ici tient limite de la résurrection… Reste une palanquée de guests vocaux reconnus mais malheureusement relégués à deux-trois strophes éparses et sans véritable autre intérêt que de faire tendre l'oreille d'un coucou-au-revoir souvent frustrant. Topo légèrement plus positif pour les guests instrumentaux puisque, même si le but affiché reste le même, les solos de chacun sauront apporter une couleur particulière à tel ou tel passage. Ah, oui, évoquons aussi la belle utilisation d'une chorale d'enfants pour les chœurs angéliques qui parsèment l'œuvre (ça demeure mieux fait que dans la plupart des exercices similaires).

Musicalement, si l'œuvre met du temps à démarrer (surtout si comme moi, vous désirez commencer par les quinze minutes narrées du prologue sur le CD2), force est constater que de la toute fin de "Silver Maiden" à "The Siege Of Aina", la montée en puissance est constante avec de bonnes doses d'epicness (passages hargneux, basses qui font des choses, solo, grattes en arpège pour alterner les ambiances) portées aux nues par la prestation de Rettke. Un Power Metal au final plutôt bien ficelé (les brûlots "Flight OF Torek", "Son Of Sorvahr", "The Beast Within", "Naschtok Is Born") et ne lésinant ni sur les rebondissements ni sur sa propension à tenter de subtiles et souvent fort à propos variations (les folkitudes de "Serendipity" ou le tribal-Prog de "Lalae Amer"). Vous pourrez ajouter à cela une finesse d'arrangements (les gars ne sont pas des branques, même quand il faut saupoudrer le tout de claviers 70s) et des thématiques parfois bien plus sombres que ce que le style sait habituellement nous proposer (viol, inceste). La seconde moitié du disque reste néanmoins en dents de scie… et pour la débuter, "Talon's Last Hope" et "Rape Of Oria" se traînent un peu et accusent certaines longueurs. Pourtant, parsemé çà et là de bonnes rockeries, l'ensemble arrive à se tenir pour finalement se conclure en apogée logique à ce type d'œuvre (mais peut être un poil en-deçà de l'attendu) : Bordel, la nourrissonne du début, devenue princesse guerrière qui colle une bonne tannée à son Grand-Méchant-Oncle, ça ne s'improvise pas !

Pour les à-côtés, si l'on tient compte du soin apporté au Mediabook extrêmement bien fourni (une illustration propre à chaque chanson) et assurément de très grande classe pour une époque où le format ne courait pas encore les rues, ET du CD bonus présentant quelques réarrangements et versions alternatives (parfois plus intéressantes que les définitives), ET (encore) du DVD bonus avec making-Of, slideshows et clip habituels (tout n'est pas intéressant, mais ça a le mérite d'être proposé), il est bien difficile de ne pas féliciter le projet sur sa forme !

Alors, comme tous ces Opera-Metal, ce disque souffrira forcément de la comparaison face à ce que sait nous présenter A.A Lucassen chez AYREON (et STAR ONE), qui caracole en tête avec ses années d'expérience ("Into The Electric Castle" et les "Universal Migrator" sont déjà sortis… "The Human Equation" débarquera l'année suivante). Mais en tout cas, les idées sont là et se tiennent. On regrettera qu'AINA ne s'en soit tenu qu'à cet unique jet, tant certaines idées auraient gagné et être développées sur une trame de plus grande envergure. Néanmoins, "Days Of Rising Doom" réussit l'exploit, à me toucher en lui trouvant de solides qualités au moment où je ne suis cette scène plus que de très (très très) loin… et, pour le coup sans que la nostalgie y joue un quelconque rôle (même si la musique d'AINA s'ancre mine de rien dans ce Power Metal que j'ai connu, très marqué du sceau des 2000, ça doit jouer aussi).


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(*) Qui m'inspira plus que de raison, puisque les "Sons Of Sorvahr" devinrent mon propre chapitre Space Marine (Warhammer 40K). Dans un prochain épisode, promis, j'évoquerai avec vous ma force de Guerriers Du Chaos (Warhammer Battle), les "Knights Of The Stormrider"…