Je suis bien content que notre cher Beagle ait pris à bras le corps l'analyse principale de cette galette, car ce délirant projet mené par le bien nommé HELLDEBERT pour l’occasion est très complexe à aborder et à juger. Pour ne rien vous cacher, mon réflexe premier a été de trouver ça très niais. Mais prenons du recul, et trouvons pourquoi c'était inévitable.

Je ne suis pas le public ciblé. Encore que, le doute est permis sur certains titres et nous y reviendrons plus tard. Le principe même des "Enfantillages" de Guillaume Aldebert dans sa version classique est de proposer de la musique aux bambins, donc comme l’ami Beagle, j'ai soumis ma progéniture de quatre piges et demi et de trois minutes de concentration à "Rock’n'Roll", "Super Momie" et "Les Derniers Pirates". Je l'ai vue se dandiner comme une petite folle en faisant les "doigts de Metal" comme dirait un certain guest que j'affectionne beaucoup, dire que c'était rigolo, avant de se casser pour reprendre des activités normales de petite fille comme chanter pour la quinzième fois "Libérée, Délivrée" alors qu'il est 8h43 ou donner des jouets à sa soeur faisant pile la taille de sa trachée. Je la rattrape donc, et lui demande de développer pourquoi c'est si "rigolo" HELLDEBERT. Réponse de la petite terreur :

"Parce que j'aime bien les pirates et que ça parle des mamies comme dans Bluey. Et le Rock c’est du Metal."

Bon.

Je suppose que le but premier d’Aldebert était d’obtenir ce genre de réaction innocente, donc en ce sens, et rien que pour cela, je rejoins Beagle avec son 3/5. Je veux dire, en toute bonne foi, les riffs, les soli, et toute l'instru de manière générale est réussie et facilement abordable (ça tombe bien), mention spéciale pour "À Mort La Vie" qui supplante le reste mais qu'il faut hélas attendre en toute fin d'album. L'énergie est débordante et pleine de bonne volonté pour initier les générations d’après aux rudiments du Metal, ou à de la musique saturée tout du moins.

Il y a juste une chose qui me chagrine. Je reviens donc sur mon "encore que". Tout "Enfantillages 666" n'est pas qu’uniquement pour nos gosses. Prenez "La Princesse", qui, en dehors de voir le dénouement à des kilomètres à la ronde, traite des difficultés de la parentalité. Oui, tous les chiards ont déjà claqué une crise au Super U à la caisse devant le Pez de Spiderman qu'on ne voulait pas leur acheter. Cela en vaut-il la peine d'en faire une chanson ? Et ces passages Techno Black Metal dignes de Super U eux aussi… Au final, Aldebert ratisse large pour tenter de racoler un public très large sous le prétexte de l'universalité de "la grande famille du Metal", s'adressant ainsi à la fois à tout le monde, et à personne.

Et là où la manœuvre aurait pu être bien négociée grâce à la Pléiade d'invités pour un artiste de la scène nationale, ces derniers ne font grâce que de leur présence, et n'apportent pas grand-chose à la mièvrerie ambiante (J.O. obligent lors de l'écriture de cette chronique, je décerne les médailles façon Fédération Française de la Lose dans l'ordre d'appel sur le podium : Johann Hegg, Amélie Nothomb, et les frères Cavalera). C'est doublement dommage, Aldebert étant clairement un artiste à texte, et pas à chant, les convives auraient pu s'impliquer davantage pour seconder sa voix frêle.

En parlant de textes et de cringe, je ne vais pas insister sur le namedropping d'artistes et de folklore musical donnant un ton assez professoral à l'œuvre, mais plutôt sur quelques punchlines assez gênantes pour les petits (venant d'un ieuv’) comme pour les grands (comme s'adressait à des demeurés), exemples à l'appui :

"Quand c'est le seum, essaie le jump" - "Seum 51"

"Mais quand elle refuse de parler, affalée sur son paddock, qu'elle ferme sa chambre à clé pour scroller sur TikTok" - "La Princesse"

"Elle parle d'autrefois en tremblant de la bouche, quand les Metallica portaient encore des couches" - "Super Momie"

"On s'arrête pas parce qu'on vieillit, on vieillit parce qu'on s'arrête" - "Rock’n’Roll"

Ok boomer.

Bref, je pense que je suis bien trop aigri pour apprécier un produit qui se veut, je l'espère, plus bienveillant que mercantile, mais je n'arrive pas à me détacher des banalités qui dégueulent de partout : les Metalleux sont des rebelles avec des tatouages, qui aiment les films d’horreur, écoutent la musique très fort pour s'affirmer, etc. Clairement, Aldebert a le syndrome de Peter Pan, ou entame une sacrée crise de la cinquantaine… À moins qu'il ne s'agisse finalement de la fusion parfaite entre Chantal Goya et Philippe Manoeuvre (vous savez, celle de Dragon Ball avec les doigts qui se touchent mal) ? Putain, mais c'est ça, c'est Chantal Manoeuvre !

En résumé, ça m’a fait plaisir d'avoir vu ma rejetonne gigoter sur autre chose que les génériques de ses dessins animés débiles, mais ce qu'elle me réclamera malgré tout sera sa Reine des Neiges à la con, et ça tombe bien je m'y suis habitué, car ça, au moins, ça a le mérite d'être assez catchy pour s'être ancré dans mon cerveau, contrairement à ces "Enfantillages 666".

Allez tous en chœur : "Je voudrais un bonhomme de neige…"

Note réelle : 3/5 pour un gosse de primaire, et quelque part entre 1/5 et 2/5 pour n'importe quel autre âge au-dessus, et même en-dessous.

Morceaux préférés : Peu importe, je n'y reviendrai pas.