Après la patate de forain dans le museau, la chignole dans le crâne ! Ma foi, pourquoi pas après tout, c’est également assez représentatif de l’évolution des Texans, qui à l’époque où la plupart de leurs contemporains s’essayaient à séduire un public plus large, les frangins Abbott font viscéralement l’inverse, remettant le couvert deux ans plus tard, alourdissant plus encore leur son. Notez pour la fine bouche et les esthètes en tout genre, que l’artwork original représentait une perceuse forant un trou dans un anus. Je me demande bien pourquoi le label a rejeté cette proposition raffinée… Sale, méchant, poisseux, d’une puissance phénoménale, "Far Beyond Driven" est le digne successeur de "Vulgar Display Of Power" à ce titre, offrant notamment une ouverture de toute beauté, avec un quatuor introductif impérial. Mention spéciale au riff de "Becoming" sur fond d’une basse démente (désolé Fenryl, je l’adore pour ma part, ce riff) et à "I’m Broken" et son groove insensé, qui à lui seul pourrait définir le genre.

Anselmo est magistral dans son exécution, allant piocher quelques influences Hardcore dans son phrasé de manière plus marquée encore que sur les précédents opus de la formation (flagrant sur le final de "25 Years" ou sur "Throes Of Rejection"). Tout muscle saillant, PANTERA broie les cervicales à en faire pâlir un ostéopathe de jalousie, tandis que Dimebag nous gratifie peut-être de la meilleure participation soliste de sa trop courte carrière. LAMB OF GOD a dû bouffer beaucoup de cet opus dans son biberon, Randy Blythe le premier.

Malheureusement, la bibine et les drogues ont déjà commencé à attaquer le sens du jugement du groupe. Si la basse de Rex claque comme jamais sur "Good Friends And A Bottle Of Pills", le manque de discernement du combo est patent pour coller ce délire dans la tracklist, en plein milieu qui plus est. La seconde partie du disque n’atteint jamais le niveau de la première, se perdant dans des compositions souvent peu inspirées, à l’exception d’un sens du rythme toujours impeccable.

Ce n’est donc pas tant le côté stéroïdé à outrance de la bête qui me dérange, bien au contraire, mais plus le sentiment que PANTERA avait ici commencé à céder aux chimères du succès et de ses conséquences néfastes. Trop de temps morts au milieu des titres ("Hard Lines Sunken Cheeks", "Slaughtered", "25 Years", interminable et chiante comme la pluie), l’ensemble sombre peu à peu dans le grand n’importe quoi au niveau de l’écriture, malgré le talent évident des musiciens. Après un départ en fanfare, et malgré la reprise hallucinée et hallucinante de "Planet Caravan" du SABBATH noir, "Far Beyond Driven" se et nous noie peu à peu dans le bourbon, peinant à retrouver la verve qu’en de trop rares occasions ("Shedding Skin", bien mordante), malgré une production toujours aussi impeccable.

Malheureusement, la tournée qui suivra (et s’achèvera aux US en compagnie de PRONG, quelle affiche !) marquera les débuts de la fin, les comportements erratiques d’Anselmo sur scène, bien aidé en cela par la schnouf, devenant de plus en plus difficiles à supporter pour les deux frères.

Note réelle : 3,5/5.