Paris, vingt-septième et dernier étage d’un gratte-ciel, dans les toilettes des bureaux de l’étage réservé à l’équipe de Nightfall In Metal Earth, un cinq septembre de l’an deux mille vingt-quatre à vingt-deux heures cinquante-neuf minutes.

- Mmmmmmmmppppffffffff (schilka-schlika)… Mmmmmmmmppppffffffff
- « Ah Kol, ça boome, qu’est-ce que t’écoutes avec ton casque ? »
- « Hein ? Quoi ? Moi ? Mais qu’est-ce que tu fous là, Fenryl ? T’es pas parti encore à cette heure-ci ? Euh, non rien, un truc, quoi ! »
- « Mais t’avais les mains dans le calecif ? Pourquoi ? »
- « Non, rien, je réajustais mon slibard, évidemment… »
- « ah, ok, ok… Mais t’écoutais quoi, dis ? »
- « arf, le dernier DARK TRANQUILLITY, pardi, bien entendu ! »

Tuons tout suspens d’entrée : "Endtime Signals" poutre. Voilà, c’est dit. Moins envoûté que Fenryl par "Moment", qui contenait néanmoins son lot de morceaux éternels, j’appréhendais quelque peu ce nouvel essai. Trop Mid-tempo, trop d’alternance chant clair/Growl systématique sur la seconde partie, "Moment" ne m’avait qu'à moitié séduit, malgré une entame de toute beauté. Je lui préférais significativement son aîné, "Atoma", qui avait su atteindre une forme de graal, après quelques disques plus neutres.

On ne saura sans doute jamais pourquoi Jivarp s’est fait éjecter, lui le dernier membre original à l’exception de Stanne, mais force est de constater qu’il était l’un des principaux songwritters des légendes de Göteborg. Exit également Anders Iwers, remplacé par Christian Jansson, comparse du frontman chez GRAND CADAVER. La stabilité du line-up n’a jamais été l’un des points forts de la formation, mais avec le départ de Chris Amott (ARCH ENEMY), élément aussi instable que de l’astate s’il en est, cela laissait DARK TRANQUILLITY bien démuni, avec principalement Stanne, Brändström et le petit dernier, Johan Reinholdz arrivé sur la précédente galette, aux commandes, ce qui semble à première vue un chouya maigre au moment d’attaquer la treizième livraison de mon groupe fétiche.

Mais rien n’y fait, les Suédois sont insubmersibles, une entité qui va au-delà des membres qui la composent. Tel le Real de Madrid au foot, la culture de l’excellence fait partie de l’ADN du combo et se transmet aux nouveaux membres de façon naturelle. Essentiellement composé par le trio cité ci-dessus, chaque musicien trouve néanmoins sa place, et notamment Joakim Strandberg Nilsson (ex-IN MOURNING), qui apporte une variété de jeu que l’on pensait hors de propos sous la longue ère Jivarp, qui avait fini par faire le strict minimum. Rien que cela fait un bien fou, aère les compositions, leur confère une belle identité. Quant à Reinholdz, il s’est fondu dans le moule avec une facilité déconcertante. Outre l’aspect composition très réussi, il nous gratifie de très beaux soli et de riffs incisifs tout au long de la galette, lui qui n’avait que peu été impliqué dans le processus de création sur "Moment".

On retrouve donc une plus grande versatilité sur "Endtime Signals", qui s’inscrit quelque part entre "Atoma" et "Moment", tant au niveau de la qualité que de l’intention. Les morceaux les plus durs, jamais dénués de mélodicité, tels que "Unforgivable", "Drowned Out Voices", "Enforced Perspective" ou "A Bleaker Sun" succèdent aux pistes plus mélancoliques comme le superbe "One Of Us Is Gone" (*), dédié au regretté Fredrik Johansson qui avait écrit les prémices de cette chanson, "Shivers And Voids" ou le final "False Reflection", en mode "In Truth Divided", inspiré par l’ancien Niklas Sundin, qui réalise une fois de plus le magnifique artwork d’"Endtime Signals". Inutile de préciser que Stanne est une fois de plus magistral, ce qui est un pléonasme tant le bonhomme est systématiquement impeccable et se bonifie avec le temps. Sa voix claire, plus scrupuleuse ici, est toujours utile et ne verse jamais dans le pathos, comme ce put être parfois le cas par le passé dans d’autres circonstances (The HALO EFFECT).

DARK TRANQUILLITY est bien vivant en 2024, retrouve la gniacke sans sacrifier la beauté inspirationnelle ("Our Disconnect") qui le caractérise depuis près de 35 ans. Ce groupe est magique.

Note réelle : 4,5/5.

(*) A noter que le post de Stanne annonçant le décès de Johansson en 2022 sur les réseaux sociaux commençait par cette phrase : "one of us is gone". Bel hommage que de reprendre ces termes deux ans plus tard afin de les graver sur bandes pour l'éternité.