Les meilleures blagues sont toujours les plus courtes…

Au moment où le plus gros manque de respect envers SLAYER, c'est sa propre actualité envers lui-même (oui, ta reformation, gros, nan mais je meurs), les gonzes et zesses de FU MANCHU, KYUSS, LOWRIDER, MONOLORD, YEAR OF THE COBRA et KYLESA ont justement choisi ce timing très particulier pour venir tartiner grassement le répertoire de Gros King & Co. en se permettant (ô, grand sacrilège) de mettre en musique un délire qui n'aurait certes peut-être pas dû dépasser le lendemain de cuite où il fut élucubré, mais-que-quand-même, l'idée était trop bonne pour ne pas se la faire mettre !

En tout cas, chez NIME, tant du côté de la rédaction que des commentaires, le bousin ne laisse pas indifférent (*) et, en plus d'ajouter l'avis d'un Doomeux à c't'histoire là, je m'en vais un peu vous tempérer tout ça.

Oui, car avec SLOWER ( \m/ "SLOOOOOOOOOOOOOWEEEEEEEEEEEEER !!" \m/ ), vous vous doutez bien qu'il ne s'agit pas d'abîmer ni de taper sur votre Thrash favori, mais juste de proposer une relecture Stoner-Doomy, et donc décélérée et décérébrée, à ce qu'ont su nous proposer Gros King - roi des entrechats et des valses en pipeaux majeurs - et compagnie entre 1983 et 1990 via cinq extraits de courte durée - non je déconne - qui mine de rien s'avèrent plutôt bien roulés, pour peu bien sûr qu'on sache apprécier l'essence même de l'exercice de réappropriation, en plus de celle du style pratiqué (bah, c'est dans le nom, vous vous attendiez à quoi, les gars ?!), ce Doom qui tâche (et qui fâche, a priori), avec des accords encore plus flottants que l'espèce de moquette en peau d'opossum qui pendouille du menton de KK-la-défonce (hey, t'as voulu réduire un mastodonte de la scène à ta seule personne, moi, j'me lâche) depuis bien trop d'années.

Et à ce jeu, ainsi transfigurées et sous accordées, baignant dans des émanations sludgy que l'on ne leur aurait jamais supposées, "South Of Heaven" et" War Ensemble" (dix minuuuutes, hahahaha, parfait !) s'en sortent rudement bien. C'est lent, hypnotique et lancinant, apporte quelques idées bienvenues (l'envolée de guitare sur "The Antichrist", sérieusement qui l'a vue venir ?) et le fait d'avoir confié le micro à Amy Tung Barrysmith (YEAR OF THE COBRA, la compilation "Women Of Doom") et Laura Pleasants (KYLESA, seulement sur "South Of Heaven" qui moi, m'envoûte) s'avère judicieusement pensé tant les deux nanas savent hypnotiser leur auditoire dans les remous et les espaces sidéraux et insoupçonnés qui se terraient entre les doubles croches de la partition originale. On se laisse happer, le groove est sein, et si les soli gagnent en épaisseur ce qu'ils perdent en folie, n'empêche que ça sied bien à la proposition du tribute-band. Surtout que, hey, hein, on le reconnait quand même bien, sous-jacent, ce riffing-signature typiquement malsain du SLAYER de la grande époque sur "Dead Skin Mask", "War Ensemble" (dont, perso, je n'ai pas vu passer les dix minutes) ou "The Antichrist".

Seulement voilà, à chaque médaille son revers, et il est vrai que passé les deux compos qui bornent l'album (et à la rigueur "The Antichrist", qui me parle encore), voilà que "Bood Red" se perd carrément en chemin et que "Dead Skin Mask" n'arrive jamais à réellement atteindre toutes les promesses qu'elle laissait entrevoir. Le milieu de disque, plus anecdotique car manquant de mordant, bat donc clairement le chaud et le froid et tend sa bajoue molasse à ses détracteurs. Et c'est quand ce gimmick commun à SLOWER et SLAYER - qui les lie plus étroitement qu'on ne voudrait le croire -, je parle de ce désossage de nuque de rigueur (lourd pour l'un, frénétique pour l'autre) n'est plus de mise … qu'on tend vite à s'ennuyer. Et ça ne manque pas, une certaine désinvolture surnage et s'installe vite. Et c'est là, à mon avis, où SLOWER va (trop) loin et loupe un peu son pari : cet album (39 minutes contre les 21 des originales mises bout à bout) n'aurait peut-être jamais dû en être un, là où un EP, plus concis, se concentrant sur deux-trois compos, aurait finalement pu contenter tout le monde, tout en restant du domaine de la bonne potacherie… Et à tous les aficionados qui hurlent à l'inconvenance musicale, rappelez-vous le parti-pris de SLAYER en 1996 !! Bref.

Finalement, il faudra se lever tôt pour retrouver la musique qu'on aimait chez KK-les-tribaux-trololo. Mais dans un sens, n'est-ce pas ça qui définit de bonnes reprises, des relectures qui ont quelque chose à dire et à proposer ? Car non, ce n'est certainement pas en rejouant l'originale note pour note, sans doute le truc le plus paresseux au monde si vous me demandez (ça, et Kiki-la-bricole (©) qui tente des masterclass de ses propres compos, #PayeTonGuitariste #RIPPetitAngeDeLaMortPartiTropTôt). Ce que j'en dis, c'est qu'on s'en fout pas mal que ça ressemble ou pas : cet hommage - le plus chaud depuis celui d'Alex Twisted et sa lap dance - est ici appuyé et pimpé comme une 8.6 au salon du bon goût, certes, mais cela devait être fait, la blague semblant trop bonne à Bob Balch pour ne pas saisir l'occasion de pousser le délire et qu'un autre esprit retord s'en charge à sa place. Moi, perso, j'ai passé : un bon moment…

… mais c'est un fait : les meilleures blagues sont toujours les plus courtes.

:::

(*) On se croirait dans une chronique de BELL WITCH (cf. "Mirror Reaper").