Les 148 dernières secondes de "Highlander (The One)", huitième piste du second album de LOST HORIZON, appelé "A Flame To The Ground Beneath" constituent l'apogée du Power Metal. Le genre n'a jamais été meilleur et ne le sera plus jamais. De la même manière qu'il existe une vitesse maximale ou une température minimale dans l'univers, il est impossible de faire du Power et de faire mieux, c'est comme ça c'est une loi physique. Vous trouverez le détail de ma démonstration dans le prochain numéro de Nature, elle a été peer-reviewed, c'est acté et confirmé. La science avance et le progrès n'attend pas.

Cette volonté d'établir logiquement et irréfutablement la supériorité de ces deux minutes et vingt-huit secondes provient à la base de mon goût personnel, je n'ai pas honte de l'admettre. On sous-estime souvent combien l’intuition irrationnelle est une force considérable dans l'avancement de la science et dans le travail du scientifique. J'ai fini par me poser cette question en remarquant que j'étais capable dans mon lecteur musicbee de trouver très précisément le début de cette section rien qu'en cliquant sur la waveform, sans doute par habitude et mémoire musculaire. De même je sais très précisément combien de temps il faut appuyer sur la touche retour arrière de mon lecteur CD pour revenir au début de cette section. Maintenant que j'y pense, ne possédant pas de platine je n'ai pas pris la peine d'indiquer une autre façon de trouver cette section à ceux qui écoutent l'album sur vinyle (car bien sur vous écoutez déjà LOST HORIZON), alors voilà, elle commence très précisément à la seconde occurrence des paroles suivantes :

He's the one, pure in his heart
Shining fair in the pride never lost
Noble grace, unbroken faith
Running throughout the fields immense
Shouting free in the air embraced
Dancing there with the wind

Si chaque inflexion, chaque détail, chaque grain de ces lignes est déjà d'une perfection immaculée, d'une noblesse éternelle évoquant lorsque les guitares arrivent sur "...unbroken faith..." l'essence même du Power Metal dans toute la gloire de son kitsch immortel, il ne s'agit que de la première pierre de cet édifice. Si la lamentation héroïque de la guitare et les accords de clavier constituent encore ici les meilleures réponses possibles au début de cette section, tels le pré-refrain de "Wisdom Of The Kings", il s'agit de vous préparer au sommet, à l'apex, à l'ineffable. Les dernières lignes vocales de Daniel Heiman représentent, au-delà des mots, tout ce que le Power Metal a pu vouloir être.

Le cri de l'humain face à l'univers, l'intensité infinie de ses sentiments, la liberté totale à laquelle il aspire, le refus de toute forme d'emprise sur sa vie. "Je suis, je peux" est tout ce qu'il signifie. Que vienne la coda récapitulant et concluant comme un voile tombant sur la scène et tout a déjà été dit. Un des meilleurs leads de l'histoire et on est déjà presque absent. Très rarement une voix humaine seule aura pu véhiculer tant de choses, et comme je le disais dans mon introduction, jamais cela n'a été le cas dans le Power Metal auparavant, et jamais plus cela ne le sera.

Il est possible qu'à ce stade du texte, vous commenciez à douter de mon honnêteté ou ma sincérité devant la densité supercritique de superlatifs. Je vous prie néanmoins de croire que je suis entièrement sérieux et que l'usage de chacun de ces adjectifs a été minutieusement calculé.

Quelque part, en écrivant cette chronique j'ai gagné un peu de respect pour tous les groupes de Power Metal qui ont continué à sortir de la musique après 2003. Car si ma démonstration n'a vraiment été achevée qu'en 2021, la plupart des musiciens du milieu avaient déjà l'intuition de ce résultat et n'en attendaient que la confirmation. Et il me semble qu'il faut une grande dose d'humilité et de courage pour continuer à jouer ce style tout en sachant très bien qu'on ne fera jamais mieux que ce qui existe déjà.

Sinon le reste de l'album est pas mal mais moins bien que "Awakening The World" quand même.