Oyez, oyez, gentes Metalleux zé Métalleuses, par décret officiel signé de la main décharnée du Grand Maître Du Métal, les années 2024/2025 sont déclarées bénies (ou maudites, c’est une question de PoV) pour les sombres disciples des arts obscurs, et ce pour l’éternité. Cette courte période aura en effet vu l’un de ses plus éminents représentants nous partager tout son savoir, sa grandeur, son talent, au sein de quatre hordes maléfiques : GRAND CADAVER, DARK TRANQUILLITY, CEMETERY SKYLINE, et donc The HALO EFFECT. Gloire et honneur au nouveau thuriféraire, qui porte en sa crinière les stigmates d’un feu sacré qui valut à bien des stryges déchues de terribles châtiments il y a de cela quelques siècles (à la louche, hein !). Hail to Mikael Stanne, qui cache sous une apparente accessibilité et bonhomie une hyperactivité donnant le tournis.

Quelques mois à peine après un "Endtime Signals" savoureux déboule donc "March Of The Unheard", essai sophomore du All-star Band suédois. Pour les caves, les flemmards qui n’arrivent pas à cliquer sur un lien, et les autres ayant subi les affres d’une cryogénisation impromptue, précisions à toutes fins utiles que The HALO EFFECT possède la particularité d’être composé d’anciens membres d’IN FLAMES, et pas des moindres. Outre le chanteur des premiers émois, il réunit ni plus ni moins que son père fondateur, fils spirituel de l’ombrageux monarque et grand magicien du saint-riff devant l’éternel, j’ai nommé Ze ouanènenonli Jesper Strömblad himself, Niclas Engelin (guitare), Peter Iwers (basse) et Daniel Svensson (batterie) et œuvre à exhumer le son et l’âme de la période dorée du Death mélodique made in Göteborg dans les années 1990.

Ceux qui en revanche avaient un tant soit peu suivi vont vite comprendre mon embarras à l’écoute de ce second opus sorti un peu moins de trois ans après son prédécesseur. Il se trouve que j’avais été enchanté par "Days Of The Lost", pour lequel j’avais totalement succombé à l’instar de mes estimés collègues, malgré une légère carence en agressivité. Le disque avait naturellement fini en sélection du site et incité notre ancien confrère Momo Heartbreaker à venir y apposer, du fond des ténèbres, son petit commentaire perspicace. Permettez-moi donc de le citer, présentement : "Véritable cure de jouvence me concernant que ce disque. C'est puissant, mélodique, parfaitement écrit". Loué sois-tu, Momo, homme de goût. Que NiME te bénisse, toi et les tiens.

Le problème, ayant envoyé toute la purée de manière précoce dès le premier LP, est le suivant : que faire lorsque son successeur le domine légèrement d’une pointe de mèche rousse ? Quels superlatifs invoquer ? Faut-il créer une super sélection platinum world elite master pour l’occasion ? Dois-je m’entraîner en compagnie d’Antoine Dupont à multiplier les cadrages-débordements sur le terrain, afin de tromper la vigilance de Jeff et Fenryl et d’appuyer sur le bouton "Sélection" depuis la chambre forte de NIME, malgré la règle informelle consistant à ne jamais ainsi sacraliser deux disques successifs d’un même artiste ? Si "March Of The Unheard" finit en haut à gauche du site, vous saurez que j’y suis parvenu. Dans le cas contraire, merci de bien vouloir appeler le 911 car j’aurais sans doute aucun été rattrapé par l’un des deux tauliers et débité en morceaux par les arpions calleux du second, meilleur ouvrier de France karateka (oui, je balance, kessya ?), à grand renfort de Mawashi-geris (coup-de pieds circulaires).

Car, c’est incontestable, malgré toute la qualité du premier essai, "March Of The Unheard" réussit à faire mieux que "Days Of The Lost". On y retrouve toutes les qualités du premier effort, à savoir un sens de la composition et des mélodies aiguisées comme des couteaux japonais, des Twin-guitares plus NWOBHM que JUDAS et MAIDEN réunis, une production en béton armé, permettant de conserver l’esprit de Göteborg tout en le dépoussiérant, au contraire d’un IN FLAMES ayant un temps troqué son identité afin de la moderniser. A l’instar des vœux du révérend GIBBONS au moment de choisir “La Futura” comme nom du dernier album de ZZ TOP, The HALO EFFECT propulsait le Melodeath scandinave dans le tur-fu d’un bon de trente ans, enchaînant banger sur banger. Seuls discutables bémols, ce léger déficit auparavant évoqué en matière de férocité et des lignes de chant clair, toutes parcimonieuses soient-elles, un brin mièvres et moins inspirées qu’à l’accoutumée.

À l’instar des Musclés (en minuscule, faut pas abuser), Niclas et sa bande persistent et signent ici un superbe opus, un chouia plus varié que le précédent, également plus mordant dans son riffing et ses rythmes. "Niclas et sa bande" ? Vraiment ? Je le pense sincèrement, et c’est un plaisir de le voir enfin sur le devant de la scène. Si Strömblad apporte incontestablement sa touche unique aux leads harmonisés, Engelin s’éclate de la première à la dernière seconde. Les grattes sont d’ailleurs l’une des immenses satisfactions de la galette. Ça faisait d’ailleurs bien longtemps que je ne m’étais pas autant éclaté à poncer un disque de la sorte afin de saisir toutes les subtilités de celles-ci, pourtant d’apparence d’une simplicité infinie. Que ce soit les licks, les soli, les riffs, tout est parfait, jamais démonstratif mais d’une efficacité incroyable. Evidemment, les mélodies accrocheuses sont plus que jamais de sortie, et viendront hanter mes méninges pendant de longs mois comme autant d’imparables earworms.

Stanne excelle comme à son habitude, usant en grande majorité de son growl profond et intelligible, réservant son timbre gothique pour quelques chorus en fin de galette de manière homéopathique, mais bien mieux intégrées à mon sens (“Forever Astray”). J’évoquais la variété accrue des chansons. C’est bien le cas, la formation convoquant ainsi guitares acoustiques racées d’appellation d’origine contrôlée et chœurs profonds (les instrumentaux "Coda" ou "This Curse Of Silence", introduisant un title-track tubesque), ou des cordes également sur la symphonisante et grandiose "Between Directions". Le disque en ressort grandit, apparaissant moins linéaire que son aîné.

Avec "March Of The Unheard", The HALO EFFECT nous invite à un voyage à travers le temps, conjugué au passé comme au présent, magnifiant tant d’émotions si contradictoires et en même temps ô combien complémentaires. "Detonate" déboîte le slip, "Between Direction" émeut par sa gravité, "Cruel Perception" remue les tripes, "A Death That Becomes Us" darktranquillityse mieux que l’original… Chaque titre possède une belle altérité et véhicule une authentique identité qui parcourt naturellement, l’air de rien, les quarante-quatre minutes d’un Death mélodique désespérément aussi old-school que contemporain, sincère et jouissif, que l’on croyait à jamais disparu. C’est décidément dans les vieux pots qu’on fait les meilleures soupes !