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2024 1 Fire Blades From The Tomb
 

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PONTE DEL DIAVOLO - Fire Blades From The Tomb (2024)
Par WËN le 8 Juillet 2024          Consultée 1999 fois

L'Italie (du Nord). Cette brune ensorceleuse aux courbes cinématographiques. Fière héritière d'un patrimoine fertile et propice aux arts mystiques de toutes sortes et de toutes époques, il n'est pas étonnant, pour qui souhaiterait s'affranchir des kitcheries parfois trop prononcées qu'elle aime aussi mettre en avant (suivez notre regard), de pouvoir y débusquer tout un grouillant microcosme biberonné aux gialli, aux antiques et épiques architectures et aux belles voix : preuve en tout cas d'un culte de tous les moments à un certain esthétisme léché et grandiloquent. Avec cette part de ténèbres propres à ses plus sournois penchants, elle a décidément tout pour plaire.

Engendré à tâtons lors d'un jam sulfureux impliquant divers représentants de formations locales, PONTE DEL DIAVOLO a, depuis son premier méfait commis en 2020, consciencieusement balisé son territoire au gré de 3 EPs d'une quinzaine de minutes chacun. Même si nous ne l'attendions pas forcément - la hype s'étant un peu dissolue lors d'une année 2023 silencieuse, occupé que le quartet était à peaufiner son art - voilà que 2024 bourgeonne et que s'abat vertement la lame pénétrante du gang de Turin qui, de ce premier full-length, en plus de confirmer toutes les promesses que laissaient entrevoir ses précédents travaux, se fait également le pourvoyeur de notre premier véritable crève-cœur de l'année.

Pour la faire courte, via son Doom/Black clandestin et sans fioriture, la bande se meut sur les traces de toute une cohorte de compatriotes emmenées par des vocalistes habitées : fières et ardentes démones d'un autre temps (Cadaveria - daronne des harpies - en tête, pour son œuvre chez OPERA IX ou en solo) ou contemporaines ensorceleuses de par leurs récentes expositions, comme Virginia Monti (DEAD WITCHES, PSYCHEDELIC WITCHCRAFT), Kjiel de NOTTURNO (dont nous devons beaucoup trop vous parler) et Marzia Silvani et son MARTHE de one-woman band (dont nous devons beaucoup trop vous parler). Citer Sara Bianchin de MESSA et BOTTOMLESS (qui compte en ses rangs Laura Nardelli, qui basse sur ce présent PONTE DEL DIAVOLO) prend également sens, tant le buzz actuel qui entoure son groupe principal a sans doute dû participer à l'émersion de quelques vocations (nous l'espérons en tout cas).

C'est toute cette tradition orale et vocale que perpétue et honore Elena 'Erba Del Diavolo' Camusso alors que le disque se fait à peine effleurer le sillon. Et qu'elle entrée en la matière ! "Demone", sur fond de trémolos Black-Metal surprenamment pesants, doublés d'un décrochage rythmique putassier, permet à notre gorgone vengeresse, de dégainer sa verve hallucinée en une vindicte italienne éructée avec animosité à la face de toute bienséance, signant - ni plus ni moins - que le plus impressionnant démarrage de disque de 2024 ! "Covenant", "Red As The Sex Of She Who Lives In Death" sortent de terre au gré d'hypnotiques introductions immodérément plombées, et savent mettre en valeur toutes les racines d'Europe du Sud du combo (AVA INFERI, voire SINISTRO, et leurs langoureuses scènes d'agonie, lézardant sous un soleil écrasant, ne sont jamais très loin). Les langues comme les mains se délient : les vocalises sont altières, le riffing suffisamment lourd et agressif pour ne jamais stagner ne serait-ce qu'un instant, oscillant, sous fond de Post-Punk ésotérique, entre parties dissonantes typiquement Black et travail de sape indécrottablement Doom-Metal .

Et c'est justement là, que PONTE DEL DIAVOLO sort son premier et plus bel atout, à savoir la très fine maîtrise de son art. Plutôt qu'un classique mélange Doom/Black, plombé de noirceur, la fine équipe a cela pour elle que sa formule racée et déjà très caractéristique ne se contente pas de simplement panacher les parties classiquement lentes à d'autres plus agressives. Oh que non ! En une astucieuse - et un brin sournoise - ébullition, les Italiens s'enjaillent à fusionner les gimmicks des uns à même la structure des autres, et vice-versa. Ainsi, leur Black devient accablant ("La Razza"), et leur Doom singulièrement véloce ("Zero") ; tout cela participant à baigner leur partition dans une certaine perversité contre-nature. Les refrains rudement appuyés de "Demone", ou les entre-couplets de "Covenant", rythmiquement lourds et se parant de leads Black principales sorties de nulle part pour venir réveiller vos morts en une danse honteusement macabre, sont typiquement des exemples de cette posture toute sauf conventionnelle. Car PDD, c'est tout cela à la fois, avec ce qu'il faut de lourdeurs occultes (tout est en place, cf. "Nocturnal Veil", "Demone") et d'embruns cadavériques propres à cette très particulière scène italienne, encore renforcés par ce souffle urbain qui sied si bien à ses origines piémontaises (le clip de "Demone").

Deuxième point, le groupe ne ménage pas ses efforts au moment de couper son auditoire du monde et du temps et ce, grâce à un grisant concours d'artifices peu communs, à commencer par - à toute prêtresse, toute politesse ! - la prestation de son Erba Del Diavolo de vocaliste qui se démène ici et donne tout ce qu'elle a, vivant ses textes (*) en une performance habitée jamais avare, ni en montées en puissance tragiques (les "lalaaalaaaaa" étourdissants de "Res As The Sex …" et autres "Everything is no-thi-hiiiing" de "Nocturnal Veil"), ni au moment de déverser son fiel en un flow macabre ("Domine", on en a parlé), ou de se permettre quelques gutturalités, râles et autres incartades davantage orientées Dark-Wave pour venir compléter sa cabalistique besogne. PONTE DEL DIAVOLO persiste et signe, par l'emploi d'un thérémine (sur ce genre de partition Doom et occulte, c'est un "oui" direct) pour clôturer le fantomatique "Covenant", mais surtout, SURTOUT, grâce aux apports sporadiques de cette clarinette-basse qui donne ses notes de noblesse à un "Nocturnal Veil" par son envoutante et dramatique intervention et qu'on surprend, plus discrète, sur "Covenant" et "Red As The Sex …", par son minage sous-jacent du riff principal. Enfin, comment taire ces deux basses que l'on aperçoit en concert et que l'on devine reconduites sur album même si rien ne le mentionne dans les crédits. Ainsi "Covenant" et "Nocturnal Veil" gagnent en épaisseur là où "Red As The Sex Of She Who Lives In Death" vient nous distiller quelques visions d'apocalypse.

Enfin, la prod de Danilo Battocchio (LAST MINUTE TO JAFFNA), à la fois profonde et abrasive comme une journée d'été méditerranéenne, est parfaite et ne laisse nulle place au moindre égarement, malgré tout ce petit monde à coordonner. Même les œillades appuyées à la Dark-Wave et au Post-Punk ("Covenant") que PDD distille sur les braises brûlantes de son méfait, voire les clins d'œil post-metal sur "Zero" et sur le final de "Red As The Sex Of She Who Lives In Death", ainsi mis en valeur, ne paraissent jamais déplacés. Ajoutons à cela l'ultime temps-fort du disque : à savoir le fantastique travail de réappropriation (en profondeur) de "The Weeping Song" de NICK CAVE (et de ses mauvaises graines), ici divinement Black et succulemment Doom (avec Davide Straccione de SHORES OF NULL en feat. vocal), que nous hésitons fortement à aborder davantage ici, tant nous vous encourageons à courir l'écouter ! Aux dires du groupe, un mois fut nécessaire pour la mettre en place et pour lui trouver de dignes arrangements, mais le défi s'avère amplement relevé : quelle intensité !

C'est sur ce définitif sentiment de travail pleinement accompli que le groupe nous laisse, pantois, haletant sous le rythme de cette course effrénée imprimé par son disque qui, en aucun moment, ne saurait faiblir. Et à partir de là, nous pouvons sans sourciller vous garantir que nous tenons une sortie qui, logiquement, devrait faire date cette année à condition bien sûr qu'elle puisse atteindre son public. Ce "Fire Blades From The Tomb" confirme en tout cas tout le potentiel que laissait transparaitre les Italiens. Car sous ses courbes atypiques, se faisant le pont fantasmé entre deux rivages radicalement opposés et à priori irréconciliables de notre musique favorite, PONTE DEL DIAVOLO nous prouve qu'il sait honorer son patronyme.

(*) Partagés 50/50 entre anglais et italien (voire davantage pour "Zero").

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- Erba Del Diavolo (chant)
- Nerium (guitare)
- Krhura Abro (basse)
- Laurus (basse)
- Segale Cornuta (batterie)
- Davide Straccione (invité - chant #7)
- Vittorio Sabelli (invité - clarinette-basse #2, 3, 5)
- Lucynine (invité - thérémine #2)
- Andrea L’abbate (invité - synthés #2)


1. Demone
2. Covenant
3. Red As The Sex Of She Who Lives In Death
4. La Razza
5. Nocturnal Veil
6. Zero
7. The Weeping Song (nick Cave & The Bad Seeds)



             



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