Vous allez me dire, à quoi bon "kro-Xer" un album pour aller strictement dans le même sens que le chroniqueur ayant la parenté légitime d’un groupe - et le dire en moins bien car on parle de Beagle ici quand même ? Tout simplement car comme le dit ce dernier, "il n’y a que les idiots qui ne changent pas d’avis", et que dans le cas d’un groupe aussi populaire et donc mécaniquement clivant que SPIRITBOX, enfoncer le clou me paraît nécessaire. Et puis ça fera les pieds aux "Cétémieuavan" ascendants "Élitistes-de-troquet".

En effet, là où le groupe aurait pu surfer sur une vague plate tant son nom tourne sur tous les médias dématérialisés, et nous pondre un second effort de la facilité et/ou de la consensualité (oserai-je dire comme le premier ?), Laplante et Stringer nous sortent un banger, tout simplement. Avis aux sceptiques.

Tout l’aspect inconstant et parfois terne de "Eternal Blue" est totalement gommé, la plupart des onze titres de cette généreuse galette ayant des arguments solides pour se défendre, mais dont le dénominateur commun est le charisme désormais pleinement affirmé de la frontwoman, d’une hargne non feinte et viscérale au point de m’avoir cloué à mon fauteuil pas assez molletonné pour l’impact à la première écoute. Sans mettre au rebut son chant clair, Laplante a réussi à peaufiner son grain de voix, la différenciant de ses homologues féminines au chant saturé qui se fraient petit à petit une place dans le Metal-game, pour le plus grand bien d’une mixité encore somme toute relative.

Sous la coupe d’un Prog-Djent teinté de Core, "Tsunami Sea" délivre régulièrement des mandales, qui, non contentes d’être redoutablement efficaces, s’octroient le luxe d’être groovys à souhait ("Black Rainbow", "No Loss, No Love" sonnant très JINJER). Si l’on fait une avance rapide, on pourrait même aller sur des titres flirtant avec la Pop, sans évidemment sombrer dans le ridicule ou le putassier ("Deep End"). Un autre tour de force, bien que cela puisse sembler trivial décrit ainsi de manière laconique, réside dans le fait que l’album s’enchaîne littéralement sans discontinuité, tel le courant d’une rivière avec son courant aléatoire : tantôt calme, tantôt tortueux, à l’instar de l’intrication de la musique avec des paroles profondes de sens.

Sans être herculéen, l’effort porté sur le travail des fûts par Rosenberg est remarquable, accompagnant les essais (transformés) du couple leader, qu’importe le rythme et l’intensité qu’il impose (le break de "Keep Sweet" est tout simplement brillant).

Comme simple regret, je pourrais noter une seconde partie d’album en deçà de la première à partir de l’éponyme, plus diffuse et moins rentre-dedans, sans perdre pour autant son identité. À force de se prendre des coups de poing sans sommation depuis le début, on commence à flairer l’instant où les breaks poindront ("Ride The Wave" est un chouïa obvious, "Crystal Roses" presque hors-sujet).

Pour digresser, il était logique que SPIRITBOX perde la meilleure performance Metal face à GOJIRA aux Grammys pour leur haut fait aux J.O. Il n’empêche que leur statut de dauphin, bon perdant de surcroît, associé à leur hype, n’a aucunement entaché leur motivation de produire un album ultra-ficelé et participant avec brio à la popularisation d’un genre irrévocablement de niche… Et pour les bonnes raisons. "Tsunami Sea" est la définition même de bon travail bénéficiant d’une reconnaissance qui leur est due, tout simplement.

Morceaux préférés : "Black Rainbow", "Fata Morgana", "No Loss, No Love".