En 1994, MÖTLEY CRÜE ne ressemble en rien à ce qu’il a été la décennie précédente. Vince Neil est parti (viré ?), John Corabi le remplace au chant et vient seconder Mick Mars à la guitare, le look n’a plus grand-chose à voir avec celui des ’80, les cheveux sont pour certains plus courts, les tatouages sont mis en avant. Et avec ça, les musiciens ont le culot de proposer un album éponyme qui s’accroche à l’air du temps et qui tourne le dos aux préceptes des opus précédents. Ça, c’est ce que l’on appelle avoir du culot.

Et "Mötley Crüe" est un très bon album, même s’il souffre d’une espèce de crise identitaire que l’on peut replacer dans le contexte musical de l’époque. Le Grunge est passé par là, ce qui était cool avant ne l’est plus forcément, l’heure n’est plus à l’entertainment, le monde n’a plus envie de s’amuser quand tout s’effondre un peu partout, du communisme à l’économie, du Mur de Berlin aux puits de pétroles du Koweït.

Aussi le CRÜE se fait plus sombre, il va parler de sujets de société, la fête est terminée, mesdames récupérez vos strings, messieurs rangez vos bites dans les pantalons. Et pour le coup, la musique va sonner de façon bien plus Heavy, lourde et surtout, bien plus lente. Le groupe va proposer un lot de riffs bien insistants, les deux guitares fonctionnent à merveille et John Corabi chante vraiment bien (ouais, ça fait bizarre d’écrire ça au sujet de MÖTLEY CRÜE), il apporte une nouvelle dynamique au groupe, qui grandit, mûrit.

Et que dire de cette production, absolument énorme ? Bob Rock signe là un véritable boulot d’orfèvre. L’éponyme de METALLICA ? Moins impressionnant en définitive. Le grand bénéficiaire de ce son, c’est Tommy Lee dont la batterie atomise tout et sonne comme elle ne sonnera plus jamais (et c’est bien dommage). En fait, "Mötley Crüe", ne serait-ce sa longueur, aurait tout pour être un véritable chef d’œuvre sauf que…

… Sauf que les fans n’ont pas suivi et que le disque ne se vendra pas très bien, contraignant Sixx à revoir quelque peu ses plans. Si vous aimez ce disque, jetez-vous sur SIXX A.M., ce "Mötley Crüe" peut être considéré comme un préquelle plus qu’intéressant, nécessaire. Personnellement, ce disque figure parmi mes préférés du groupe, que j’écoute souvent, bien plus que "Girls Girls Girls" ou que tout ce qui sera sorti par la suite. Un disque solitaire dans une discographie qui ne compte pas forcément beaucoup de coups audacieux. Celui-là l’était. Peut-être aurait-il fallu changer de nom...