Je ne ferai l’affront à personne d’à la fois vous rappeler qui est Jerry Cantrell ni de vous conter encore et encore mon admiration sans limite sur sa personne comme sa carrière…

Nous sommes une nouvelle fois sans nouvelle de son espace solo depuis presque vingt ans quand arrive la pandémie. L’occasion de remonter en selle pour donner une suite à "Degradation Trip volumes 1 & 2" (2002) se voit ainsi repoussée, comme beaucoup de sortie à l’époque C’est donc le 29 octobre 2021 que débarque ce "Brighten". Il s’agit par la même occasion de son premier effort indépendant.
Si Jerry prend en charge quasiment tous les postes de l’opus, il sait à nouveau s’entourer : Duff à la basse, Abe Laboriel Jr. (le batteur de Paul Mc Cartney), Greg Puciato (The DILLINGER ESCAPE PLAN).

"Un voyage des ténèbres vers la lumière"… C’est ainsi que Jerry Cantrell qualifie cet opus. Le ton est donc donné.
Il faut reconnaître que cela ne surprendra personne : Grunge dans l’âme depuis toujours (membre fondateur du style faut-il le rappeler avec ALICE IN CHAINS), "Brighten" fait partie de ces opus qui se révèle au fil des écoutes, au fil des heures et du temps qu’on lui consacre. La première étape consiste à se placer dans la zone "Ok, c’est du Rock Grunge lent"… La seconde étape vous fait découvrir tout le travail de réalisation et de composition : Jerry module sa voix, il glisse des effets avec sa guitare à tous les niveaux. Chaque moment d’écriture (lyrics et musique) laisse apparaître une véritable volonté de beauté. Oui car il faut à un moment assumer le fait que la mélancolie qui dévore cet opus est parfaitement mise en adéquation avec cette forme de luminosité.

Je m’explique sans pour autant tenter de justifier la citation précédemment donnée de l’auteur lui même : si vous redoutez un effet MAD SEASON ("Above") qui dégouline de dépression et de noirceur, vous pouvez être rassuré tant Cantrell cherche toujours à proposer une musicalité positive à l’issue de chaque titre. "Atone" puis "Brighten" en ouverture placent le cadre. "Prisme Of Doubt" est davantage Country/Blues dans son approche, l’ouverture un brin naïve de "Black Hearts And Evil Done" se veut plus Folk, Country, Americana. Les effets de guitare slide ici sont d’une douceur peu commune, offrant vraiment un espace apaisant et lumineux peu commun dans le répertoire du guitare d’ALICE IN CHAINS. Deux mid-tempos viennent nourrir le cœur du projet ("Had To Know" et "Nobody Breaks You"), tout juste intéressant mais plus fades.

Par contre, dès les premières notes de "Siren Song", vous savez qui est l’auteur : il s’agit sans aucun doute du morceau le plus proche d’ALICE IN CHAINS… expliquant qu’il constitue à mes oreilles le climax de cet opus. Lancinant, sombre et envoûtant, aucun doute, du pur génie Cantrell où les harmonies vocales sont sublimes. À savourer au coin du feu en fermant les yeux. Jerry Cantrell ne rate pas ses sorties et il nous gratifie de deux superbes moments avec "Dismembred" - encore une fois très Americana dans sa proposition en forme de bande-son de film où le personnage principal est au volant d’une voiture, traversant les États-Unis, nous permettant de voir les paysages défiler par la fenêtre – puis avec le cover d’Elton John, idole de Jerry (souvenez vous, il était déjà là pour le grand retour du groupe ALICE IN CHAINS avec "Black Gives Way To Blue") : "Goodbye".
Un exercice délicat et tout en beauté qui vient clôturer un très beau moment offert après vingt longues d’années d’attente.

"Brighten" est album juste, infini pour son écoute et d’une beauté assumée. Il illustre toute la magie que sait proposer son auteur, artiste brillant, totalement dévoué à sa cause, loin de l’industrie musicale factice moderne. Toutefois, cette douceur et cette proposition Country Rock Grunge assumée pourrait ne pas contenter tout le monde, ces derniers feraient un drôle d’erreur.
Quelques notes de douceurs dans ce monde fou...

Top : "Siren Song", "Atone", "Brighten".